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écrire, c'est dessiner

mis à jour le 24/11/2024


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En quoi l'affirmation des gestes, des traces, les effets du mouvements et de déplacements indiquent la présence du corps de l'auteur ? Qu'est-ce que l'autonomie du geste en dessin ou en peinture ?

mots clés : écriture, calligraphie, mots, geste, encre, signature, autonomie du geste


Document sans nom
 


Grâce à la trace laissée par un geste, l'artiste livre une mémoire à l'humanité.
Cette séquence permet d'étudier en quoi l'affirmation des gestes, les traces, les effets de mouvements et de déplacements indiquent la présence de l'auteur dans l'oeuvre. 
Il s'agit d'apprendre aux élèves l'importance de la main qui trace et qui relie le corps à l'intellect, et de comprendre la notion d'autonomie du geste en dessin ou en peinture.

à l'école, il est souvent attendu des élèves qu'ils restent assis - en tous cas, une bonne partie de leur journée. Cette attente invisibilise le corps, qui est pourtant aussi un outil pour apprendre. En effet, la mémoire est aussi kinesthésique. En se mouvant, en manipulant, en étant autonome, on sollicite la mémoire du corps.

Ici, il s'agira de mettre les élèves en situation de lâcher-prise, de relative liberté, de viser l'apprentissage de leur autonomie et leur prise d'initiative. Arriver à comprendre ce que l'on entend par l'autonomie du geste en peinture ou en dessin, en cours de séquence, est l'un des objectifs visés. 
Cette-ci se décline en trois parties : une séance de dictée graphique où la ligne est vue comme un fondement du dessin, une séance où le corps entier est mis en mouvement, une autre où l'accent sera mis sur la main comme organe de connaissance à travers un entraînement à l'écriture, à la signature. 

On dessine avant de savoir écrire et compter.
Comme l'écrit en 2008 Nancy Huston, dans L'espèce fabulatrice, le propre de l'humain est de raconter des histoires. Aussi, avant d'inventer l'écriture, on tapait en rythme et on dansait, on dessinait sur les parois des grottes et sans doute s'exerçait-on au préalable sur une surface instable, comme Jean Rouaud le suppose dans son roman Préhistoires, 2022

Les explorations plastiques sont ici déclinées en trois séances : une dictée graphique, le corps qui réfléchit, et une signature ; et soutenues par des références artistiques présentées à différents moments, sous des formes variées.

 

Document sans nom
 

Un texte est lu en classe, il s'agit d'une histoire de ligne, qui traverse différents événements, diverses émotions. Pendant la lecture, mise en scène à la manière d'une dictée -préparation d'une copie à carreaux pour support, jeu des intonations et de la ponctuation- les élèves tracent, sur une feuille de classeur, la ligne au feutre noir narratrice du texte. La dictée est détournée, elle est purement graphique. On apprend une première fois, aux élèves, la racine de ce terme, qui signifie que lorsqu'ils écrivent, ils dessinent aussi, des lettres. L'écriture est un dessin.
Les actions lues à la classe laissent des traces expressives sur le support. Ces traces sont des dessins abstraits. Ils sont le résultat de l'interprétation libre d'un texte et ne nécessitent aucune traduction. Ils existent aussi pour eux-mêmes.

Le cours s'achève sur une question plutôt que sur une affirmation : pour quelle raison l'humain a-t-il depuis toujours eu ce besoin de laisser une trace de son passage ? Qu'est-ce qui a bien pu le pousser à dessiner sur les parois des cavernes ?

On regarde les Etudes de turbulences de Leonard de Vinci, ainsi que Je, quel drôle de mot de Christian Dotremont. à voir dans le paragraphe Références

 

Document sans nom
 

Sur un grand format - ici format raisin, avec de la peinture, les élèves sont amenés à danser. Ils sont debout, un outil à la main, et écoutent de la musique. J'ai choisi un morceau joué par des musiciens burkinabès sur plusieurs balafons. Il n'y a pas de paroles. Le rythme est soutenu, entraînant. Grâce à la peinture, les élèves laissent des traces de leurs mouvements, marquent le rythme, choisissent souvent différentes couleurs vives et rencontrent spontanément l'abstraction. Ils disent eux-mêmes, lors de la verbalisation, qu'ils se sont sentis libres, qu'ils n'ont pas eu à réfléchir, ou plus exactement que c'est leur corps qui a réfléchi.

peinture gouache


Pour certains, accéder au lâcher-prise a été un exercice plus difficile, tant ils sont habitués à des consignes scolaires laissant peu de place à l'improvisation. Rendre visible ce corps qui les porte et abrite leurs consciences m'a paru alors plus que nécessaire. Permettre à tous d'être un peu moins destablisés par l'exercice de leur libre arbitre, aussi.

encre aquarelle


On regarde Number 1 de Jackson Pollock, ainsi que Multitude 6 de Lassaâd Metoui. à voir dans le paragraphe Références.

 


La séance commence par une évaluation diagnostique. Les élèves voient à l'écran la proposition et sont interrogés sur le sens de ce terme : "Signature", sur tout ce qu'il recouvre.
En quelques minutes, l'essentiel est prononcé à travers ces quelques mots : important, unique, un geste, des lignes, des initiales, désigne quelqu'un, authentifie, est facile à tracer pour son auteur, est difficile à falsifier, officiel, gribouillis, écriture...

Avant d'apporter davantage de précisions aux élèves, nous prenons quelques instants pour leur rappeler ce qui a été appris lors des deux précédentes séances. La Dictée graphique a permis de questionner la ligne, le lâcher prise, l'autonomie du geste graphique.
Le corps qui réfléchit, que les élèves appellent la danse, a amené les élèves à placer leur rapport au corps, au mouvement, au sein d'une recherche picturale.
Pour Une signature, l'accent est mis sur la main.
En maternelle, les enfants, pour apprendre, passent par le concret. Afin d'entrer en écriture, ils appréhendent d'abord le monde par la manipulation. La main est le premier outil de connaissance de l'humain. La posture du corps et de la main est essentielle dans le geste d'écrire.
Amenés à définir une signature personnelle, les élèves vont s'entraîner un certain nombre de fois avant de maîtriser le geste pour le tracer en grand, à l'encre de Chine. Ils ont la possibilité d'essayer la plume, le pinceau rond, la brosse ou la calame.
Cette signature doit être assez travaillée pour être difficilement falsifiable, mais suffisamment efficace pour que son auteur puisse se l'approprier et la reproduire à l'infini.

Dix minutes leur sont accordées pour qu'ils tracent trois signatures différentes.
Ensuite, ils en choisiront une qui sera celle qu'ils travailleront à l'encre de Chine.
L'un d'eux demande "Et si on a déjà notre signature ?". Il leur est proposer de la travailler s'ils le souhaitent, ou bien d'en chercher une seconde qui serait leur signature d'artiste, peut-être même reliée à un pseudonyme.
En passant prendre leurs supports et leurs outils pour l'étape suivante - les pots d'encre de Chine ayant été placés sur leurs tables pendant qu'ils cherchaient des signatures sur leurs cahiers, les élèves sont invités à tracer, sans modèle, leur signature sur un tableau blanc.

Dix autres minutes leur permettent de s'exercer sur un support format A5 afin de s'approprier médium et outils et de tracer leur signature sur le format A3 avec les outils de leur choix.

Ensuite, par deux, ils sont invités à compléter un court texte en lien avec une référence. Celle-ci est reproduite et plastifiée, posée sur les tables des îlots. Il s'agit de cinq mots-clefs à placer dans le texte.



On regarde les Etudes de turbulences de Leonard de Vinci, ainsi que, à nouveau, Je, quel drôle de mot de Christian Dotremont (à voir dans le paragraphe Références)

Les deux textes à compléter sont lus à la classe par les élèves qui ont travaillé sur ces oeuvres. Certains termes sont explicités car un peu complexes. Mais les élèves ont le goût des mots et certains se souviennent, lorsque l'on convoque les procédés de Leonard de Vinci, de la forme surgissant de l'informe, du concept de sérendipité - terme abordé en classe de 6e.

Puis, une élève, au sujet de l'oeuvre de Christian Dotremont, fait appel à un autre terme questionné lors de la première séance : la calligraphie. Les élèves parviennent à se remémorer le sens étymologique de ce mot : en grec, kallos signifiant beauté, et grapho, écrire, ou plus exactement dessiner les lettres.

Alors l'expression écrire, c'est dessiner prend tout son sens.


Un extrait vidéo (à visionner ici) sur la calligraphie clôt la séance en ouvrant sur une autre dimension, spirituelle et culturelle.

 

Document sans nom
 

Parmi les références montrées à différents moments de la séquence, on pourra faire figurer ces citations :
- "Les uns pensent, dit-on, les autres agissent ! Mais la vraie condition de l'homme, c'est de penser avec les mains.", Denis de Rougemont, Penser avec les mains ;
- "La main est action : elle prend, elle crée, et parfois on dirait qu'elle pense.", Henri Focillon, L'éloge de la main ;
- "I'm not what I am, I am what I do with my hands." Louise Bourgeois.

C'est à l'occasion d'un bilan en début de quatrième séance que les élèves ont à choisir et à copier dans leurs cahiers l'une de ces citations. Ils sont invités à argumenter leur choix à l'oral. Le retour sur le travail effectué depuis le début de la séquence peut avoir lieu à ce moment là, en complétant notamment un plan de travail* synthétisant les compétences évaluées, la définition de l'autonomie du geste en peinture ou en dessin, les consignes données lors des différentes séances.

On peut poursuivre sur de nouveaux questionnements ayant un lien avec ce qui a été travaillé ici ; en l'occurence une analyse d'oeuvre dans le cadre du PEAC, en lien avec le temps et le processus artistique : Michel Blazy, Le Lâcher d'escargots, 2009 (à retrouver ici).

       

Leonard de Vinci,
Etudes de turbulences,
codex Arundel, 
entre 1480 et 1518

Christian Dotremont,
Je, quel drôle de mot...,
1975

Jackson Pollock,
Number 1,
1949

Lassaâd Metoui,
Multitude 6,
2015

       

Rosetsu Nagasawa,
Slug, non daté,
entre 1754 et 1799

Cy Twombly,
Untitled,
1970

Fabienne Verdier,
Vortex,
2020

Heather Hansen,
Emptied gestures,
2000-2018

Télécharger ici le document rassemblant des textes sur les oeuvres.
*Télécharger ici le plan de travail de la séquence.
Télécharger ici le projet d'enseignement.

 
 
 
auteur(s) :

julie janet

information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux, --- COLLÈGE ---, Cycle 4, 5ème

type pédagogique : leçon

public visé : non précisé, enseignant

contexte d'usage : classe

référence aux programmes : L'oeuvre, l'espace, l'auteur, le spectateur
La relation du corps à la production artistique : l'implication du corps de l'auteur ; les effets du geste et de l'instrument, les qualités plastiques et les effets visuels obtenus, la lisibilité du processus de production et de son déploiement dans le temps et l'espace.

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