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Un passage peu ordinaire!

"Ce jour d'hiver, le temps était sec et le froid glacial. La gelée du matin ne fondait pas et la surface de l'eau n'était plus qu'une épaisse plaque de glace...

Dès 5 heures 30 du matin, des ouvriers arrivaient pour traverser la Loire comme chaque jour".

Pour Monsieur Martin, c'était la routine car il travaillait dans un café de l'autre rive depuis déjà une quinzaine d'années. Ce café, le "Chapeau de tôle", était très fréquenté par les conducteurs de Bacs et les ouvriers. Tout le monde connaissait monsieur Martin, cet homme si généreux et si sympathique, qui chaque midi accueillait tous les travailleurs pour leur proposer un repas simple, copieux et peu cher...

 

Ce matin-là, monsieur Martin était sur les lieux et nous racontait l'épisode de la traversée de la Loire gelée :
"Le froid engourdissait nos membres et les vingt cinq personnes qui att
endaient risquaient de ressembler bientôt à des statues. Il fallait envisager quelque chose rapidement. C'est alors que le capitaine du bac nous annonça qu'il était impossible de traverser le fleuve et que nous devions rebrousser chemin. Cette réponse ne satisfaisait pas du tout les ouvriers pour qui une journée sans travail représentait une perte de salaire. Alors, un grand gaillard, un docker qui n'avait peur de rien, une tête brûlée, décida d'aller sonder la glace en s'y engageant à pieds, afin de tester si elle résistait au poids d'un homme. Les autres, renonçant à cette idée folle et dangereuse, préférèrent se rendre de l'autre côté par le pont à plus de 15 kilomètres en amont sur le fleuve. Le trajet serait beaucoup plus long, mais plus sûr.

Le docker noua une corde à sa taille afin que l'on puisse le hisser si par malheur la glace cédait sous son poids. Il pesait au moins 80 kilos. Il entama sa traversée d'un pas assuré, avec une aisance qui nous laissait sceptiques. Quand il fut sur l'autre rive, il se mit à sauter de joie et, par de grands gestes, nous invita à le suivre...
Ce fut la première fois que je traversai la Loire à pieds".