Suivons donc R... tout au long de ces sept semaines de PTI et mettons-nous à la place de l'enseignant qui a adopté, pour lui comme pour les autres, une posture d'observation et de recul. Lors de la première séance, R... décide de commencer par ranger ses classeurs. Mais aucun contrôleur n'est disponible pour l'aider. Après dix minutes pendant lesquelles il se "perd" dans ses feuilles mal classées, il abandonne et se dirige vers l'apprentissage des tables. Il se rend à la table de matériel, où se trouvent des cartons vierges, pour réaliser un jeu de cartes à multiplier : là, il retrouve X... qui est de même niveau que lui. Ils décident de travailler ensemble. Ils écrivent les tables et s'interrogent mutuellement. Lors de la deuxième séance, R... reprend son travail avec X... Ils continuent la fabrication de leur jeu et s'interrogent. Ils mettent de côté toutes les cartes qui leur posent problème. À la troisième séance, R... révise, puis se sent prêt à être interrogé sur ses tables. Après trois ou quatre questions, l'enseignant intervient car il a constaté qu'il les sait jusqu'à 6. Il lui propose de se concentrer sur 7, 8 et 9 et le renvoie à des techniques différentes d'apprentissage. Veille, donc, du côté de l'enseignant, mais une veille active ! Enfin à la séance4, un contrôleur est disponible, et R... décide de ranger ses classeurs. Lors de la cinquième séance, l'enseignant constate que presque tous les élèves sont en retard sur leur tableau de marche en ce qui concerne l'étude de la langue. Un coup de barre est donné ; R... va chercher une fiche C3, niveau 1. Il s'agit d'un QCM (questionnaire à choix multiples) sur la justification des terminaisons des mots. Il réussit la fiche. Il va en chercher une seconde. Idem. Il vient voir l'enseignant pour lui dire que c'est "trop facile". Sa compétence niveau 1 se trouve validée et il va pouvoir faire des exercices à trous. À la sixième séance, R... fait une fiche C3, niveau 2. Il y arrive facilement. Pas question de perdre du temps, l'enseignant le suit et l'engage à faire du C3 niveau 3. Lors de corrections avec transpositions, l'élève se trouve cette fois confronté à des exercices qui lui posent problème. Lors de la séance suivante, R... décide d'entamer un exposé sur la Turquie dont sont originaires ses parents. Il va faire une recherche sur internet et commence à réfléchir à son plan. Entre temps, il rapporte des documents de la maison et poursuit son travail. À la séance 9, R... annonce qu'il sera prêt à présenter son exposé la semaine suivante. Pour l'aider, l'enseignant lui délivre les critères d'évaluation d'une bonne présentation orale d'exposé. Le jour suivant, R... présente son exposé et ensuite, il reprend son travail en C3, niveau 3. Si R... achevait et validait son PTI avant la fin des séances imparties, il passerait automatiquement en B3, niveau 3 : cela consisterait, pour lui qui est bon lecteur, à lire des classiques. Mission accomplie pour lui et pour chacun.
Alors, si le PTI nécessite du travail, serait-il néanmoins une panacée ? Certes non ! Au terme de cette expérimentation, des questions se posent : faut-il prévoir des brevets pour évaluer la priorité travaillée de manière plus précise ? Comment gagner en précision dans les progressions ? Tous ces travaux courent le risque de s'émietter dans le temps. Faut-il prévoir un cahier de PTI, au risque de perdre la spécificité du système ?... Autant de questions qui, pour trouver réponse, demandent du temps et des collaborations. Pour l'adulte, comme pour le jeune, le plan de travail est individuel, certes, mais le I du sigle ne gagnerait-il pas à être également synonyme d'interactif ?
1. Meirieu (Philippe), L'école, mode d'emploi, ESF collection pédagogie, 1992, p. 136-137.
2. Décret 2006-830 du 11 juillet 2006.