En naviguant sur le livre numérique
Passeurs de mémoires, le lecteur traverse l'histoire avec une imprégnation visuelle et auditive forte. En effet, tout au long de l'année, les lycéens de terminale L sont devenus auteurs-journalistes de terrain. Dès le lancement du projet, fin septembre, les modalités de production du e-book sont précisées. Par groupes de deux, les élèves vont s'engager dans l'écriture du livre multimédia articulé autour de sept thématiques, correspondant aux sept étapes majeures vécues par Abraham Fridman : la vie à Paris, Drancy, Auschwitz, Birkenau, Struthof, Buchenwald, le Lutécia (
voir annexe). Chaque binôme d'élèves choisit une de ces thématiques et se charge d'en écrire le contenu à partir de multiples documents et des témoignages rencontrés. Sur les heures d'AP (aide personnalisée) ou chez eux en autonomie, ils doivent constituer la trace écrite d'ici fin février : trois paragraphes, auxquels se réfèrent plusieurs liens interactifs (écoute d'interviews, extraits de documentaires, annexes cartographiques...). Le contenu n'est pas exhaustif, l'enjeu consiste bien à mettre en exergue les possibilités complémentaires du numérique, en corollaire d'un projet profondément humain. Dès le mois d'octobre, Abraham Fridman vient au lycée, devant les élèves, pour une conférence pleine d'émotion. Il vient à la rencontre de la classe et d'autres lycéens, le temps d'une conférence-témoignage. Les adolescents prennent leurs premières notes, posent de multiples questions. Monsieur Fridman retrace, à soixante-dix années d'intervalle, son parcours hors du commun. Pendant la guerre, il vit à Paris. Il est arrêté le 22 juillet 1944 pour être interné à Drancy, puis déporté à Auschwitz par le convoi du 31 juillet 1944 (le dernier !). Ce convoi comprend mille trois cents personnes dont trois cents enfants. L'exposition "C'étaient des enfants"
2 de l'hôtel de ville de Paris évoque cet épisode douloureux. Une semaine après la rencontre-conférence avec Abraham Fridman, fin octobre, toute la classe part à Paris pour s'immerger dans cette exposition, puis au mémorial de la Shoah. Les binômes poursuivent leur travail de relevé d'informations et de prises photographiques. Peu à peu, les traces écrites des sept chapitres se profilent, relues et étayées par l'enseignant. En février, le groupe visite le nouveau mémorial de Drancy, où un nouveau survivant déporté, Jacques Altman, leur évoque son passé poignant. Des prises de son viennent immortaliser la rencontre. Enfin, en mars, c'est à Auschwitz, puis à Buchenwald et enfin au camp de Struthof que la classe suit le sillage d'Abraham Fridman. Le projet est devenu partie intégrante du groupe-classe, car selon Jackie Pouzin, "un témoignage vécu, et vivant, est toujours bouleversant". Des cartes illustrent également le propos, enrichies après corrections et commentaires des autres membres du groupe. Si une certaine liberté pour construire le chapitre est laissée à l'initiative des élèves, chacun doit néanmoins reformuler ou consolider son contenu en fonction des remarques des camarades qui relisent également le travail des autres. Ceux-ci le font spontanément lors des heures d'AP, tel un comité éditorial, ou à tout autre moment de la journée. Ainsi, cette carte de déportation plus que sommaire, survolée, a été modifiée sur logiciels de cartographie (
géoportail comme image de fond puis
édugéo en montage) pour trouver une place digne de ce nom dans le livre collectif. De lui-même, l'élève auteur a pu constater la trop grande légèreté de son travail et y remédier, en progressant sur sa maîtrise des outils numériques. L'aide personnalisée trouve ici tout son sens.