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mis à jour le 11/03/2015
Inscrit dans un projet global 1 de développement durable, l’aménagement paysagé de la cour du collège Le Ronceray du Mans enrichit et développe, dans un tissu d’actions variées, le travail de tout le réseau pédagogique. Mais il modifie aussi profondément l’image de l’établissement. En impliquant différents acteurs locaux et en valorisant le travail des élèves, cette action crée un fort sentiment d’appartenance à une communauté éducative.
mots clés : échanger, réseaux pédagogiques, collège-primaire, maternelle, projet, développement durable
Dans la cour du collège, des espaces verts, déjà existants, mais réaménagés, en côtoient d’autres, nouvellement conçus et réalisés. Ce projet concret est complexe, il combine une multitude d’objectifs pédagogiques convergents. Il se fonde d’abord sur des apprentissages scolaires et une éducation au développement durable. C’est la partie immergée de l’iceberg. Mais l’axe social est aussi central dans cette action : outre les nombreux liens tissés dans le collège, elle en crée aussi avec l’extérieur. En effet, des partenariats avec des associations et des acteurs locaux, tout comme l’ouverture aux écoles du réseau Éclair, ont vivifié et nourri le projet. Cette action a aussi un autre objectif, le plus visible : embellir ce collège, ancien bâtiment militaire puis annexe d’un lycée dans les années soixante, avec une grande cour bétonnée. Cent soixante-sept collégiens y sont scolarisés cette année. Les locaux, vastes, permettraient d’en accueillir davantage. Rendre le lieu plus beau et donc plus accueillant, c’est aussi changer son image, casser les appréhensions des plus petits comme de leurs parents vis-à-vis de leur futur établissement scolaire. En valorisant le travail mené par les élèves, en paysageant un espace jusqu’alors impersonnel et sans vie, cette action renforce — voire crée même, sans doute, souvent — un sentiment fort d’appartenance et de fierté qui ne peut qu’être bénéfique à tous au sein de l’établissement. Il peut en effet contribuer à valoriser l’image du collège, instaurer une nouvelle relation à l’école.
Deux ans plus tôt… Dans le cadre du cours de géographie, un échange épistolaire entre "élèves des villes et élèves des champs" 4, tous sarthois, avait débouché sur une rencontre lors d’une sortie scolaire à la campagne. Ce jour-là, les enseignants ont observé avec surprise la difficile appréhension de l’espace de la part de leurs élèves habitués au milieu urbain. Ils ont réalisé que les collégiens n’avaient jamais eu de contact réel avec la terre, la plupart d’entre eux résidant en appartement, et entretenaient un rapport d’étrangeté vis-à-vis de la nature et de l’espace naturel en général. "C’est ainsi qu’est née l’idée de les amener à s’approprier les espaces verts du collège, en les réaménageant", explique S. Coué, professeur de SVT (sciences de la vie et de la Terre). À la rentrée suivante, le projet était prêt, et les classes se sont lancées dans la création d’un jardin médiéval, stimulées par leur participation au Trophée du développement durable, concours organisé par le conseil général de la Sarthe. Au début, pour beaucoup, il n’était pas question de toucher la terre ou les plantes sans gants de jardinage… Au fil des mois, grâce aux apprentissages et aux activités conduites par les professeurs, grâce aux interventions de techniciens du conseil général, le plaisir a trouvé sa place. Les élèves ont construit cette année-là un nouveau rapport à la nature. Ils ont appris à l’observer, à la respecter. Et ils sont sortis lauréats du concours. L’aventure était lancée. Les collégiens ont souhaité la voir perdurer.
Pour faire vivre le projet, des activités irradient de multiples temps de vie au collège, à commencer par les cours. Le dispositif s’inscrit en effet en lien et en continuité avec les apprentissages disciplinaires. Les programmes inspirent d’ailleurs aux professeurs des idées originales. C’est ainsi que le premier aménagement extérieur, le jardin médiéval, a vu le jour. En cinquième, en cours d’histoire, les élèves étudient le calendrier du paysan. En associant l’étude de ce chapitre au projet de réalisation de l’espace vert associé, C. Barcat, professeure d’histoire-géographie, a créé un horizon d’attente chez les élèves et un intérêt nouveau pour cette notion du programme. Elle a commencé par une approche culturelle, en classe, sur le paysage, les plantations et les variations au fil des saisons, mais aussi sur la forme du jardin au Moyen Âge : des carrés, un par saison. L’idée de créer des carrés médiévaux dans le collège a séduit les élèves. Ils ont ensuite comparé les plantations de l’époque à celles d’aujourd’hui, se sont informés sur la viabilité et l’entretien des espèces qu’ils souhaitaient planter et ont fait le choix de créer un carré de plantes aromatiques et trois carrés potagers. Certaines séances ont été dédiées à l’aménagement de ces aires potagères situées en contrebas d’une aile du collège. Il a fallu mesurer puis délimiter les espaces. Le professeur de technologie est intervenu pour encadrer la construction des délimitations en bois des carrés. Un spécialiste du plessage de l’association Passages 5 a formé les élèves à cette technique, utilisée au Moyen Âge pour orner les délimitations. D’autres étapes ont suivi, la préparation de la terre puis les plantations : du persil, du thym et du romarin pour le carré aromatique, des plantes potagères telles que salades et betteraves pour les trois autres. Au fil de ces moments successifs, les élèves ont acquis des gestes sûrs, ils ont suivi les pousses, entretenu les carrés. La récolte, fructueuse, a été distribuée aux parents. Une véritable fierté pour les néojardiniers.
S. Coué explique justement que le jardin est un moteur qui permet de mettre tous les élèves en réflexion. En sixième, par exemple, le cours sur le compostage 6 se vit en pratique. Après une introduction rapide en classe, les élèves sortent dans le jardin. Que met-on dans le composteur et pourquoi ? On réfléchit ensemble, et ensuite on observe la composition de la terre. Les élèves commencent par désherber, découvrent dessous la matière organique qui se transforme en matière minérale, et les insectes. De retour en classe, l’expérience nourrit la réflexion et permet de construire ensemble les apprentissages. L’étape suivante, un travail sur les épluchures déposées dans le jardin et sur le lombricompostage, passe aussi par l’expérimentation dans l’espace vert de la cour. Aborder les notions au programme par une visite au jardin, associant pratique et observation, permet de mettre en œuvre une pédagogie plus active. Investis dans leur espace vert, les élèves prennent plaisir à suivre l’évolution des plantes au fil des semaines et des saisons. Et puis la sortie au jardin est associée à un petit temps d’entretien et de désherbage. Cette pratique régulière permet aussi d’acquérir durablement le vocabulaire et des gestes sûrs. Aujourd’hui les élèves savent tous ce que sont des bulbes ou des semis, et leur plantation n’a plus de secret pour eux. "Les programmes 7 foisonnent d’opportunités pour aller au jardin", témoignent de concert C. Barcat et S. Coué.
L’aménagement des différents espaces verts est une opportunité qui fait prendre conscience aux élèves des connaissances et compétences, acquises dans différentes disciplines, qu’il faut mobiliser pour sa réalisation. Le métrage puis le suivi des pousses, la création de séparations en bois nécessitent par exemple l’accompagnement des professeurs de mathématique et de technologie. Le dispositif met en évidence pour les élèves les liens et les complémentarités entre les différentes disciplines. Ce travail premier, celui de la création des espaces verts concrets et visibles au quotidien, a donné l’impulsion et fait naître des actions ponctuelles qui alimentent la réflexion sur le développement durable et bénéficient d’un atout majeur : l’adhésion immédiate des élèves. Ainsi, la récolte des légumes a fourni un angle d’attaque inédit pour aborder le chapitre sur l’alimentation en SVT, au programme de cinquième. La réflexion sur la chaîne alimentaire s’est poursuivie par la visite d’une ferme. Les élèves y ont sélectionné des produits rapportés ensuite au collège, et dégustés lors d’un petit-déjeuner d’exception. L’ensemble des actions menées implique aussi de communiquer. Pour la deuxième année, un groupe d’élèves va préparer une émission radiophonique diffusée sur Cartable FM 8. Il s’agit de valoriser le projet et d’inviter les auditeurs à venir au collège lors du prochain moment fort, la fête interculturelle du quartier, au printemps, ouverte à tous et à laquelle l’établissement va participer pour la première fois en proposant des ateliers de sculpture végétale ou de plessage. Pour préparer cette émission, le professeur de français encadre les jeunes animateurs : rédaction des textes, travail de la voix et de la lecture pour capter l’attention des auditeurs. Les élèves se répartissent la parole, présentent les actions et partagent aussi leurs savoirs, sur le calendrier des semis ou des récoltes, par exemple. Cette dimension d’ouverture entre les disciplines, puis du collège vers l’extérieur séduit les collégiens qui sont fiers de s’impliquer dans le dispositif.
D’ailleurs, les enseignants notent des changements dans le comportement des élèves : en s’impliquant dans la création des espaces verts, ils gagnent en autonomie. Dans une classe de sixième, le cours sur la cité chez les Grecs s’est prolongé par un temps de travail sur l’agriculture à partir d’extraits d’un traité d’agronomie, notamment. Forts de ces connaissances, les élèves ont ensuite réfléchi à l’aménagement d’une haie sur un nouvel espace de jardin, cette fois en cours de SVT. En Méditerranée, les élèves avaient vu que les vignes couraient sur les oliviers. Comment adapter cette association à notre région ? Après réflexion sur les espèces, ils ont choisi de reproduire ce schéma en l’adaptant. L’olivier a été remplacé par une essence locale, le saule osier, allié au rosier, marqueur des maladies. Pendant une heure, chacun a créé un plan d’aménagement incluant le calcul mathématique de la surface. La séance suivante, consacrée au métrage et balisage sur l’espace extérieur, a permis de choisir le plan le plus adapté. Le rosier et la vigne ont aussitôt été plantés. "Nous donnons le cadre et les collégiens s’approprient les lieux", expliquent les enseignants. C’est ainsi qu’ils gagnent en confiance et construisent des attitudes autonomes et respectueuses. D’ailleurs, remarquent les professeurs amusés, au fil des séances, les élèves se sont spontanément approprié des rôles dans la répartition des tâches, qu’ils reprennent lors des visites au jardin : désherbage, arrosage, transport des déchets… Un entretien régulier est en effet nécessaire. Ponctuellement, sur une heure libre commune, un enseignant prend en charge des élèves volontaires pour ces travaux. Dans le but de renforcer ces attitudes autonomes, l’équipe envisage de permettre à ceux qui n’ont pas cours de mener en autonomie ces menus travaux. Un cahier serait disponible en vie scolaire. Y seraient répertoriés la liste des tâches effectuées, le nom des élèves impliqués, la date. Cette action est en réflexion, car il faudra poser des règles quant à l’utilisation des outils. Mais grâce au comportement responsable dont les collégiens font preuve, un vrai rapport de confiance s’est instauré. "Le jardinage, explique C. Barcat, libère aussi l’énergie au bénéfice de plus de calme et de sérénité dans l‘établissement comme dans nos classes". La participation active des élèves lors des actions de portes ouvertes ou pour mener des ateliers avec des plus petits conditionnait l’ouverture du dispositif à l’ensemble du réseau pédagogique. Il fallait donc au préalable construire cette autonomie, sécuriser les élèves grâce à l’apprentissage de gestes sûrs et s’assurer de leur motivation dans la durée.
Pour déployer le projet, les coordonnateurs ont créé de nombreux partenariats. Des agents spécialisés du conseil général de la Sarthe interviennent régulièrement pour apporter des conseils techniques concernant l’aménagement, les essences, les variétés ; ils ont également fourni de nombreux plants et l’outillage. Deux associations de réinsertion sont aussi partenaires, Passages et Les jardins du soleil, dont les animateurs sont intervenus en classe sur le thème du compostage, de l’aménagement du jardin, puis pour le métrage à l’extérieur. Ils ont également encadré les élèves de maternelle quand ils sont venus planter leurs semis au collège. Les petits n’ont pas été déstabilisés, car l’association intervient aussi dans certaines écoles maternelles du réseau. C’est un lien partagé qui éclaire une autre ambition du dispositif, celle de développer le travail en réseau pédagogique. Trois réunions trimestrielles sont organisées au collège en présence de B. Latouche, principale adjointe, de la gestionnaire et des professeurs impliqués. Il s’agit de faire le point sur le fonctionnement, la vie du dispositif, les projets en cours, les moyens nécessaires. C’est le moment aussi où sont formalisées des actions proposées aux écoles. La transmission des informations a lieu lors des réunions du comité exécutif 9 où siègent tous les acteurs du réseau 10. G. Rouby, coordinateur du réseau, met ensuite en place des fiches-actions à destination des enseignants des écoles pour présenter les projets et proposer des modalités pédagogiques de mise en œuvre dont les enseignants peuvent s’emparer, et qu’ils déclinent en fonction de leurs projets pédagogiques respectifs.
N. Le Rouge
contributeur(s) :Mme Barcat, M. Coué, Mme Latouche, M. Rouby, Mme Corvoisier, M. Demeslay
information(s) technique(s) : pdf
taille : 281 Ko ;
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