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Textes philosophiques : Le travail et la technique

mis à jour le 23/08/2008


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Cette ressource propose quelques sujets de réflexions et de dissertations philosophiques sur le thème du travail et de la technique.

mots clés : philosophie, culture, travail, technique


Le travail et la technique :

Texte n° 1 :

L'ouvrier s'appauvrit d'autant plus qu'il produit plus de richesse, que sa production croît en puissance et en volume. L'ouvrier devient une marchandise. Plus le monde des choses augmente en valeur, plus le monde des hommes se dévalorise ; l'un est en raison directe de l'autre. Le travail ne produit pas seulement des marchandises ; il se produit lui-même et produit l'ouvrier comme une marchandise dans la mesure même où il produit des marchandises en général.
Cela revient à dire que le produit du travail vient s'opposer au travail comme un être étranger, comme une puissance indépendante du producteur. Le produit du travail est le travail qui s'est fixé, matérialisé dans un objet, il est la transformation du travail en objet, matérialisation du travail. La réalisation du travail est sa matérialisation.
Dans les conditions de l'économie politique, cette réalisation du travail apparaît comme la déperdition de l'ouvrier, la matérialisation comme perte et servitude matérielles, l'appropriation comme aliénation, comme dépouillement. (...) Toutes ces conséquences découlent d'un seul fait : l'ouvrier se trouve devant le produit de son travail dans le même rapport qu'avec un objet étranger. Cela posé, il est évident que plus l'ouvrier se dépense dans son travail, plus le monde étranger, le monde des objets qu'il crée en face de lui devient puissant, et que plus il s'appauvrit lui-même, plus son monde intérieur devient pauvre, moins il possède en propre. C'est exactement comme dans la religion. Plus l'homme place en Dieu, moins il conserve en lui-même. L'ouvrier met sa vie dans l'objet, et voilà qu'elle ne lui appartient plus, elle est à l'objet. Plus cette activité est grande, plus l'ouvrier est sans objet. Il n'est pas ce qu'est le produit de son travail.
Plus son produit est important, moins il est lui-même. La dépossession de l'ouvrier au profit de son produit signifie non seulement que son travail devient un objet, une existence extérieure, mais que son travail existe en dehors de lui, indépendamment de lui, étranger à lui, et qu'il devient une puissance autonome face à lui. La vie qu'il a prêtée à l'objet s'oppose à lui, hostile et étrangère.

 Marx, Manuscrits de 1844.

Texte n° 2 :

Le maître se rapporte médiatement à la chose par l'intermédiaire de l'esclave ; l'esclave, comme conscience de soi en général, se comporte négativement à l'égard de la chose et la supprime ; mais elle est en même temps indépendante pour lui, il ne peut donc par son acte de nier venir à bout de la chose et l'anéantir ; l'esclave la transforme donc seulement par son travail. Inversement, par cette médiation, le rapport immédiat devient pour le maître la pure négation de cette même chose ou la jouissance ; ce qui n'est pas exécuté par le désir est exécuté par la jouissance du maître ; en finir avec la chose : l'assouvissement dans la jouissance. Cela n'est pas exécuté par le désir à cause de l'indépendance de la chose ; mais le maître, qui a interposé l'esclave entre la chose et lui, se relie ainsi seulement à la dépendance de la chose, et purement en jouit. Il abandonne le côté de l'indépendance de la chose à l'esclave, qui l'élabore.

Hegel, La Phénoménologie de l'Esprit (1807).

Texte n° 3 :

Pour expliquer ce que j'entends par gentilhomme, je dirai qu'on appelle ainsi tous ceux qui vivent sans rien faire, du produit de leurs possessions, et ne d'adonnent ni à l'agriculture, ni à aucun autre métier ou profession. De tels hommes sont dangereux dans toute république et dans tout État.

Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live, I, Ch. LV, Pléiade p. 497.

Texte n° 4 :

L'école et le travail intellectuel

I. - Il faudra remplacer le latin et le grec comme point d'appui de l'école formatrice et on les remplacera, mais il ne sera pas facile de disposer la nouvelle matière ou la nouvelle série de matières dans un ordre didactique susceptible de donner des résultats équivalents d'éducation, de formation générale de la personnalité, depuis l'enfance jusqu'au choix professionnel. En effet pendant cette période, Ies études ou la majeure partie des études doivent être (ou apparaitre aux enseignés) désintéressées, c'est-à-dire ne pas avoir de buts pratiques immédiats ou trop immédiats. Elles doivent être formatrices, même si elles sont « instructives », c'est-à-dire riches dc notions concrètes. Dans l'école actuelle, de par la crise profonde de la tradition culturelle, de la conception de la vie et de l'homme, on constate un processus de dégénêrescence. Les écoles de type professionnel, vouées à satisfaire des intérêts pratiques immédiats, I'emportent sur l'école formatrice, désintéressée dans l'immédiat. L'aspect le plus paradoxal est que ce nouveau typa d'école apparait démocratique, est exalté comme tel, alors qu'au contraire, il est non seulement destiné à perpétuer les différences, mais à les cristalliser en castes mandarines.
L'école traditionnelle a été oligarchique parce que destinée à la nouvelle génération des groupes dirigeants, appelée à son tour à devenir dirigeante. Mais elle n'était pas oligarchique par son mode d'enseignement. Ce n'est pas l'acquisition de capacités de direction, ce n'est pas la tendance à former des hommes supérieurs, qui confère son empreinte sociale à un type d'enseignement. La marque sociale est donnée par le fait que chaque groupe social a son propre type d'école, ayant pour but de perpétuer dans ces couches une fonction traditionnelle déterminée, de direction ou d'exécution. Si on veut briser cette trame, il convient donc de ne pas multiplier et de ne pas graduer les types d'écoles professionnelles, mais de créer un type unique d'écoles préparatoires (élémentaires - 1er cycle du secondaire) qui conduisent le jeune enfant jusqu'au seuil du choix professionnel, tout en le formant entre-temps comme une personne capable de penser, d'étudier, de diriger ou de contrôler ceux qui dirigent.
La multiplication des types d'écoles professionnelles tend donc à pérenniser les différences traditionnelles.

Il.-L'enfant qui se donne du mal avec les barbara, baralipton, se fatigue certes, et il faut faire en sorte qu'il se fatigue juste ce qu'il faut et pas plus. Mais il est tout aussi certain qu'il devra toujours se fetiguer pour apprendre, à se contraindre à des privations, à des limitations de mouvements physiques, c'est-à-dire à se soumettre à un apprentissage psycho- physique. Il faut persuader beaucoup de gens que même les études sont un métier, très pénible, avec son apprentissage spécial, non seulement intellectuel mais aussi musculaire- nerveux, un processus d'adaptation, une habitude acquise par l'effort, I'ennui et même la souffrance. La participation de masses plus larges à l'école secondaire amène avec elle la tendance au relâchement de la discipline des études, à la demande de « facilités ».. Beaucoup pensent même que les difficultés sont artificielles, parce qu'ils sont habitués à considérer que travail et fatigue sont le lot du seul travail manuel. Le problème est complexe. Certes, l'enfant d'une famille traditionnelle d'intellectuels surmonte plus facilement le processus d'adaptation psycho-physique ; en entrant pour la première fois en classe, il a déjà plusieurs longueurs d'avance sur ses camarades, il a une orientation déjà acquise par les habitudes familiales : il se concentre avec plus de facilités parce qu'il a l'habitude de bien se tenir, etc. De la même manière, un fils d'ouvriers de la ville souffre moins en entrant à l'usine qu'un fils de paysan ou qu'un jeune paysan déjà formé pour la vie rurale. Le régime alimentaire lui-même a une importance, etc., etc. Voilà pourquoi beaucoup de gens du peuple pensent que dans la difficulté des études il doit y avoir un « truc » qui fonctionne à leurs dépens (quand ils ne pensent pas être stupides par nature). Ils voient le « monsieur » (et pour beaucoup, dans les campagnes parti culièrement monsieur veut dire intellectuel) accomplir avec aisance et une apparente facilité le travail qui coûte des larmes et du sang à leurs enfants, et ils pensent qu'il y a là un « truc » .. Dans une nouvelle situation ces problèmes peuvent devenir très aigus et il faudra résister à la tendance à rendre facile ce qui ne peut l'être sans être dénaturé. Si on veut à l'avenir créer une nouvelle couche d'intellectuels, jusqu'aux plus spécialisés, à partir d'un groupe social qui n'en a pas traditionnellement développé les aptitudes adéquates il y aura des difficultés sans précèdent à surmonter.

 Gramsci, Les cahiers de prison, éd. Gallimard, in Éd. Média, conceptions du monde, la pratique et les fins, p. 29.

 

Texte n° 5 :

Dire que le travail et l'artisanat étaient méprisés dans l'antiquité parce qu'ils étaient réservés aux esclaves, c'est un préjugé des historiens modernes. Les Anciens faisaient le raisonnement inverse : ils jugeaient qu'il fallait avoir des esclaves à cause de la nature servile de toutes les occupations qui pourvoyaient aux besoins de la vie. C'est même par ces motifs que l'on défendait et justifiait l'institution de l'esclavage. Travailler, c'était l'asservissement à la nécessité, et cet asservissement était inhérent aux conditions de la vie humaine. Les hommes étant soumis aux nécessités de la vie ne pouvaient se libérer qu'en dominant ceux qu'ils soumettaient de force à la nécessité. La dégradation de l'esclave était un coup du sort, un sort pire que la mort, car il provoquait une métamorphose qui changeait l'homme en un être proche des animaux domestiques. C'est pourquoi si le statut de l'esclave se modifiait, par exemple par la manumission, ou si un changement des conditions politiques générales élevait certaines occupations au rang d'affaires publiques, la « nature » - de l'esclave changeait automatiquement.
L'institution de l'esclavage dans l'antiquité, au début du moins, ne fut ni un moyen de se procurer de la main-d'oeuvre à bon marché ni un instrument d'exploitation en vue de faire des bénéfices ; ce fut plutôt une tentative pour éliminer des conditions de la vie le travail. Ce que les hommes partagent avec les autres animaux, on ne le considérait pas comme humain. (C'était d'ailleurs aussi la raison de la théorie grecque, si mal comprise, de la nature non humaine de l'esclave. Aristote, qui exposa si explicitement cette théorie et qui, sur son lit de mort, libéra ses esclaves, était sans doute moins inconséquent que les modernes n'ont tendance à le croire. Il ne niait pas que l'esclave fût capable d'être humain ; il refusait de donner le nom d' »hommes » aux membres de l'espèce humaine tant qu'ils étaient totalement soumis à la nécessité.) Et il est vrai que l'emploi du mot « animal » dans le concept d'animal laborans, par opposition à l'emploi très discutable du même mot dans l'expression animal rationale, est pleinement justifié. L'animal laborans n'est, en effet, qu'une espèce, la plus haute si l'on veut, parmi les espèces animales qui peuplent la terre.

Arendt, Condition de l'homme moderne, Paris, Ed. Calmann-Lévy, 1961, pp 95-96, Pocket, 1961, p. 127 - 128.
 

Texte n° 6 :

  
L'homme est organisé pour la cité comme la fourmi pour la fourmilière, aveccette différence pourtant que la fourmi possède des moyens tout faitsd'atteindre le but, tandis que nous apportons ce qu'il faut pour lesréinventer et par conséquent pour en varier la forme. Chaque mot denotre langue a donc beau être conventionnel, le langage n'est pas uneconvention, et il est aussi naturel à l'homme de parler que de marcher.Or, quelle est la fonction primitive du langage ? C'est d'établir unecommunication en vue d'une coopération. Le langage transmet des ordresou des avertissements. Il prescrit ou il décrit. Dans le premier cas,c'est l'appel à l'action immédiate, dans le second, c'est lesignalement de la chose ou de quelqu'une de ses propriétés, en vue del'action future. Mais, dans un cas comme dans l'autre, la fonction estindustrielle, commerciale, militaire, toujours sociale. Les choses quele langage décrit ont été découpées dans le réel par la perceptionhumaine en vue du travail humain. Les propriétés qu'il signale sont lesappels de la chose à une activité humaine.

 Bergson, De la position des problèmes, philosophie et conversation, pp. 88-89.
 

Texte n° 7 :

Chercherun travail pour le gain, c'est maintenant un souci commun à presque tous les habitants des pays de civilisation ; le travail leur est un moyen, il a cessé d'être un but en lui-même : aussi sont-ils peu difficiles dans leur choix pourvu qu'ils aient gros bénéfice. Mais il est des natures plus rares qui aiment mieux périr que travailler sans joie ; des difficiles, des gens qui ne se contentent pas de peu et qu'un gain abondant ne satisfera pas s'ils ne voient pas le gain des gains dans le travail même. Les artistes et les contemplatifs de toute espèce font partie de cette rare catégorie humaine, mais aussi ces oisifs qui passent leur existence à chasser ou à voyager, à s'occuper de galants commerces ou à courir les aventures. Ils cherchent tous le travail et la peine dans la mesure où travail et peine peuvent être liés au plaisir, et, s'il le faut, le plus dur travail, la pire peine.Mais sortis de là, ils sont d'une paresse décidée, même si cette paresse doit entraîner la ruine, le déshonneur, les dangers de mort ou de maladie. Ils craignent moins l'ennui qu'un travail sans plaisir : il faut même qu'ils s'ennuient beaucoup pour que leur travail réussisse.

Nietzsche, Le Gai Savoir, I, § 42, Travail et ennui.

 

Texte n° 8 :

 
Les apologistes du travail

Dansla glorification du « travail », dans les infatigables discours sur la« bénédiction du travail », je vois la même arrière-pensée que dans leslouanges des actes impersonnels et conformes à l'intérêt général : lacrainte de tout ce qui est individuel. On se rend maintenant très biencompte, à l'aspect du travail - c'est-à-dire de ce dur labeur du matinau soir - que c'est là la meilleure police, qu'elle tient chacun enbride et qu'elle s'entend vigoureusement à entraver le développement dela raison, des désirs, du goût de l'indépendance. Car le travail use laforce nerveuse dans des proportions extraordinaires, et la soustrait àla réflexion, à la méditation, aux rêves, aux soucis, à l'amour et à lahaine, il place toujours devant les yeux un but minime et accorde dessatisfactions faciles et régulières. Ainsi une société, où l'ontravaille sans cesse durement, jouira d'une plus grande sécurité : etc'est la sécurité que l'on adore maintenant comme divinité suprême. -Et voici (ô épouvante !) que c'est justement le « travailleur » qui estdevenu dangereux ! Les « individus dangereux » fourmillent ! Etderrière eux il y a le danger des dangers - l'individuum !

 Nietzsche, Aurore, livre III, § 173, Les apologistes du travail.

Texte n° 9 :

 
Il est inconcevable à quel point l'homme est naturellement paresseux. Ondirait qu'il ne vit que pour dormir, végéter, rester immobile ; à peinepeut-il se résoudre à se donner les mouvements nécessaires pours'empêcher de mourir de faim. Rien ne maintient tant les sauvages dansl'amour de leur état que cette délicieuse indolence. Les passions quirendent l'homme inquiet, prévoyant, actif, ne naissent que dans lasociété. Ne rien faire est la première et la plus forte passion del'homme après celle de se conserver. Si l'on y regardait bien, l'onverrait que, même parmi nous, c'est pour parvenir au repos que chacuntravaille : c'est encore la paresse qui nous rend laborieux.

 Rousseau, Essai sur l'origine des langues.

Texte n° 10 :

L'un des éléments fondamentaux de l'esprit du capitalisme, et non seulementde celui-ci, mais de la civilisation moderne elle-même, à savoir laconduite rationnelle fondée sur l'idée de Beruf(1), est né de l'espritde l'ascétisme chrétien - c'est ce que notre exposé s'est efforcé dedémontrer(2). Si nous relisons à présent le passage de Franklin cité audébut de cette étude(3) nous verrons que les éléments essentiels del'attitude que nous avons alors appelée « esprit du capitalisme » sontprécisément ceux que nous avons trouvé être le contenu de l'ascétismepuritain du métier, mais dépourvus du fondement religieux déjà fortaffaibli chez Franklin(4). L'idée que le travail moderne est marqué dusceau de l'ascétisme n'est certes pas nouvelle. Se borner à un travailspécialisé, et par suite renoncer à l'universalité faustienne del'homme, telle est la condition de toute activité fructueuse dans lemonde moderne ; ainsi, de nos jours, « action » et « renoncement » seconditionnent fatalement l'un et l'autre. [.]
Lepuritain voulait être un homme besogneux - et nous sommes forcés del'être. Car lorsque l'ascétisme se trouva transféré de la cellule desmoines dans la vie professionnelle et qu'il commença à dominer lamoralité séculière(5), ce fut pour participer à l'édification du cosmosprodigieux de l'ordre économique moderne. Ordre lié aux conditionstechniques et économiques de la production mécanique et machiniste quidétermine, avec une force irrésistible, le style de vie de l'ensembledes individus nés dans ce mécanisme - et pas seulement de ceux queconcerne directement l'acquisition économique. Peut-être ledéterminera-t-il jusqu'à ce que la dernière tonne de carburant fossileait achevé de se consumer. Selon les vues de Baxter(6), le souci desbiens extérieurs ne devait peser sur les épaules de ses saints qu'à lafaçon d'«un léger manteau qu'à chaque instant l'on peut rejeter». Maisla fatalité a transformé ce manteau en une cage d'acier.

Weber, L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme, 1920, Plon 1964 p. 248 250.

 

Texte n° 11 :

  
Il faut observer que le mot valeur a deux significations différentes ;quelquefois il signifie l'utilité d'un objet particulier, etquelquefois il signifie la faculté que donne la possession de cet objetd'en acheter d'autres marchandises. On peut appeler l'une, Valeur enusage, et l'autre, Valeur en échange. - Des choses qui ont la plusgrande valeur en usage n'ont souvent que peu ou point de valeur enéchange ; et, au contraire, celles qui ont la plus grande valeur enéchange n'ont souvent que peu ou point de valeur en usage. Il n'y arien de plus utile que l' eau, mais elle ne peut presque rien acheter ;à peine y a-t-il moyen de rien avoir en échange. Un diamant, aucontraire, n'a presque aucune valeur quant à l'usage, mais on trouverafréquemment à l'échanger contre une très grande quantité d'autresmarchandises. (...)
Ainsi la valeur d'une denréequelconque pour celui qui la possède, et qui n'entend pas en user ou laconsommer lui-même, mais qui a l'intention de l'échanger pour autrechose, est égale à la quantité de travail que cette denrée le met enétat d'acheter ou de commander.
Le travail est doncla mesure réelle de la valeur échangeable de toute marchandise (....).Elles [les marchandises] contiennent la valeur d'une certaine quantitéde travail, que nous échangeons pour ce qui est supposé alors contenirla valeur d'une quantité égale de travail. Le travail a été le premierprix, la monnaie payée pour l'achat primitif de toutes choses. Ce n'estpoint avec de l'or ou de l'argent, c'est avec du travail, que toutesles richesses du monde ont été achetées originairement, et leur valeurpour ceux qui les possèdent et qui cherchent à les échanger contre denouvelles productions, est précisément égale à la quantité de travailqu'elles le mettent en état d'acheter ou de commander.

Smith, Recherches sur la nature et sur les causes de la richesse des nations, CH. 4 - 5, Gallimard Idées, p. 60-62.

 

Texte n° 12 :

En produisant, les hommes ne sont pas seulement en rapport avec la nature.Ils ne produisent que s'ils collaborent d'une certaine façon et font échange de leurs activités. Pour produire, ils établissent entre eux des liens et des rapports bien déterminés : leur contact avec la nature, autrement dit la production, s'effectue uniquement dans le cadre de ces liens et de ces rapports sociaux.
Ces rapports sociaux qui lient les producteurs les uns aux autres, les conditions dans lesquelles ils échangent leurs activités et participent à l'ensemble de la production, diffèrent naturellement suivant le caractère des moyens de production. Avec l'invention d'un nouvel engin de guerre, l'arme à feu, toute l'organisation interne de l'armée s'estnécessairement trouvée modifiée les conditions dans lesquelles des individus composent une armée et peuvent agir en tant qu'armée, ont été transformées ; il en va de même pour les rapports des diverses armées entre elles.
C'est dire que les rapports sociaux suivant lesquels les individus produisent, les rapports sociaux de production, changent et se transforment avec l'évolution et le développement des moyens matériels de production, des forces productives. Les rapports de production, pris dans leur totalité,constituent ce que l'on nomme les rapports sociaux, et notamment une société parvenue à un stade d'évolution historique déterminé, une société particulière et bien caractérisée. La société antique, la société féodale, la société bourgeoise sont de tels ensembles de rapports de production, dont chacun désigne un stade particulier de l'évolution historique de l'humanité.

   Marx, Travail salarié et capital, Pléiade, T. 1, p. 212.

Texte n° 13 :

(....) en quoi consiste la dépossession du travail ?
D'abord,dans le fait que le travail est extérieur à l'ouvrier, c'est-à-direqu'il n'appartient pas à son être ; que, dans son travail, l'ouvrier nes'affirme pas, mais se nie ; qu'il ne s'y sent pas satisfait, maismalheureux ; qu'il n'y déploie pas une libre énergie physique etintellectuelle, mais mortifie son corps et ruine son esprit. C'estpourquoi l'ouvrier n'a le sentiment d'être à soi qu'en dehors dutravail ; dans le travail, il se sent extérieur à soi-même. Il est luiquand il ne travaille pas et, quand il travaille, il n'est pas lui. Sontravail n'est pas volontaire, mais contraint. Travail forcé, il n'estpas la satisfaction d'un besoin, mais seulement un moyen de satisfairedes besoins en dehors du travail. La nature aliénée du travail apparaîtnettement dans le fait que, dès qu'il n'existe pas de contraintephysique ou autre, on fuit le travail comme la peste. Le travailaliéné, le travail dans lequel l'homme se dépossède, est sacrifice desoi, mortification. Enfin, l'ouvrier ressent la nature extérieure dutravail par le fait qu'il n'est pas son bien propre, mais celui d'unautre, qu'il ne lui appartient pas ; que dans le travail l'ouvrier nes'appartient pas à lui-même, mais à un autre. Dans la religion,l'activité propre à l'imagination, au cerveau, au coeur humain, opèresur l'individu indépendamment de lui, c'est-à-dire comme une activitéétrangère, divine ou diabolique. De même l'activité de l'ouvrier n'estpas son activité propre, elle appartient à un autre, elle estdéperdition de soi-même.
On en vient donc à cerésultat que l'homme (l'ouvrier) n'a de spontanéité que dans sesfonctions animales : le manger, le boire et la procréation, peut-êtreencore dans l'habitat, la parure, etc., et que, dans ses fonctionshumaines, il ne se sent plus qu'animalité : ce qui est animal devienthumain, et ce qui est humain devient animal.
Sansdoute, manger, boire, procréer, etc., sont aussi des fonctionsauthentiquement humaines. Toutefois, séparées de l'ensemble desactivités humaines, érigées en fins dernières et exclusives, ce ne sontplus que des fonctions animales.

 Marx, Économie et philosophie, Ébauche d'une critique de l'économie politique,Le travail aliéné, Pléiade, T. II p. 61.
 

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information(s) pédagogique(s)

niveau : tous niveaux, Terminale

type pédagogique : sujet d'examen

public visé : non précisé, élève

contexte d'usage : non précisé

référence aux programmes : philosophie, culture,  travail,  technique

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