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2. LES OUVRAGES D'ART.

2.1. Comment peut-on surveiller et observer une telle masse sous " toutes les coutures ", lorsqu'elle enjambe l'estuaire de la Loire ?

Dans un premier temps, il faut observer la partie visible du pont : les parements. C'est l'inspection " visuelle ". Il faut ensuite interpréter les défauts constatés (des fissures par exemple).

Afin d'observer les parements, on utilise de gigantesques passerelles montées sur des camions spécialisés (pour le pont de Cheviré, elles ne sont qu'au nombre de trois en France). On les appelle " passerelles négatives ".

Au cours de ces inspections, le contrôleur de travaux peut découvrir des fissures. En fonction de leur emplacement, de leur forme, ou de leur ouverture, elles peuvent être insignifiantes, ou, au contraire, le signe de défauts très graves.

On peut aussi observer des zones ou le béton est éclaté (vice-de-forme lors de la construction), ce qui laisse apparaître les aciers qui sont alors oxydés.

Dans un deuxième temps, le contrôleur de travaux contrôle la dilatation de l'ouvrage. En effet, le béton, en fonction de la température, s'allonge ou se rétracte. Ceci est un phénomène que le contrôleur se doit d'étudier, afin de garantir la sécurité des automobilistes, des motocyclistes, et la pérennité du pont.

2.2. Dans quelles conditions et avec quoi s'effectuent les réparations ?

Les contrôleur de travaux, en général, ne coupent pas la circulation lors d'une intervention.

Contrôleur de travaux changeant des haubans sur le pont de Saint Nazaire pendant la circulation

Mais ils mettent en place un grand périmètre de sécurité. Et, quand il y a des panneaux de signalisation dynamique, il les utilisent comme sur le pont de Saint Nazaire

Lorsque le contrôleur de travaux remarque des fissures, il utilise l'outil avec lequel il a assuré la surveillance : la passerelle négative. Le camion qui la supporte se situe sur le pont ; la passerelle se déploie comme une grue, décrit un arc de cercle pour venir sous le pont. Les contrôleurs peuvent alors descendre au plus près des parements. Sinon, ils utilisent des échafaudages pour par exemple réparer le bas d'un hauban sur le pont de Saint Nazaire (voir photo de la page précédente).

L'ennemi du béton de manière générale est l'eau : elle désagrège le béton, rouille l'acier... etc. Les fissures sont des défauts d'étanchéité, qui peuvent endommager le pont. Il faut les colmater avec un mortier spécial. Lorsque les aciers, à l'intérieur même du béton, sont apparents, il est nécessaire de retirer toutes les traces de corrosion, voire de casser le béton pour remplacer les aciers rouillés.

Les différentes étapes du remplacement du béton :

Quant à la dilatation de l'ouvrage, prenons l'exemple du pont de Cheviré : l'ouvrage est constitué de cinq parties distinctes. En fonction de la dilatation du béton, l'espace entre chaque partie (appelé " souffle ") varie. Le cumul de ces souffles peut atteindre 1 mètre 50. Afin de résoudre ce problème, sont posées sur la chaussée de grandes mâchoires d'acier appelées " joints de dilatation ". Ils exigent une surveillance droite, tant ils sont sollicités par le passage des camions notamment. L'écartement de ces deux mâchoires varie régulièrement et constitue un élément important du diagnostic général que fera le contrôleur de l'ouvrage.

Mise en tension des ancrages des joints de dilatation

Une autre manière de contrôler la dilatation d'un pont, c'est de surveiller ses appareils d'appui. Ils peuvent être inopérants pour diverses raisons. Il faut alors procéder à leur changement. Pour se faire, il faut soulever le caisson afin de le désolidariser de la pile, à l'aide de vérins. C'est une opération très pointue, heureusement constituée de normes de sécurité draconiennes, ce qui est rassurant quand on sait que tout ceci est effectué sous circulation, sans que nous autres usagers de la route ne nous rendions compte de rien. C'est, à ce moment, plusieurs milliers de tonnes qui se soulèvent de plusieurs centimètres. Le caisson est alors supporté uniquement par les vérins (pour le pont de Cheviré, un appareil d'appui pèse une tonne et demie).