- tous niveaux
- Libellé inconnu
- non précisé
- enseignant
- non précisé
entrevue de Gilbert Pélissier avec Christine Faucher
Christine Faucher
En France, après la décennie 60, avec l'essor de la créativité la tendance était : « à bas les références, à bas les modèles » et « nous sommes tous des artistes ». Comment décrieriez-vous cette période importante et, plus tard, quelles ont été les raisons de l'orientation que vous avez donné à l'enseignement des arts ?
Gilbert Pélissier
Pour bien comprendre l'orientation qu'il m'a été possible de donner à l'enseignement des arts plastiques en France, dès lors que j'en ai eu la responsabilité en tant qu'inspecteur général en 1987 (de 1987 à 1997) il me paraît nécessaire, en retenant seulement certains traits essentiels, de rappeler quelques faits à partir de la créativité comme phénomène
La créativité, telle une vague puissante, a déferlé en France au tout début des années soixante dix et notamment a fait irruption dans l'enseignement des arts plastiques avec d'autant plus de force qu'elle s'est située dans la foulée des « événements de 68 », véritable révolution culturelle. La mise en question globale de la société s'est effectuée dans le sens de la libération des mœurs, de l'hédonisme et de l'individualisme le plus affirmé. Ceci sur toile de fond constituée par l'abandon de la tradition et des valeurs jusqu'alors considérées comme telles. Parmi les graffitis qui fleurissaient sur les murs en 68, le plus célèbre, le plus illustratif de cet esprit libertaire a été : « Il est interdit d'interdire ». Mais aussi, par ces mêmes graffitis les perspectives culturelles étaient annoncées : « A bas les références, à bas les modèles ». Il y fut répondu, un peu plus tard, au début des années 70, par le slogan : « Nous sommes tous des poètes, nous sommes tous des artistes » qu'illustrait parfaitement, par exemple, l'Atelier des enfants du Centre Pompidou. Toutes ces formulations qui se complétaient en parfaite cohérence, signifiaient d'une manière exemplaire l'idéologie de cette époque : l'expression personnelle comme valeur nouvelle. On en connaît les conséquences : l'indistinction dans un espace social où s'estompent et disparaissent les catégories, les hiérarchies, où s'affaissent les contenus au profit du comportement, où créatif se confond avec créateur et amateur avec professionnel. Les écoles d'art ne savaient plus quoi enseigner, à commencer par la première d'entre elle, l'Ecole nationale supérieure des beaux-arts (le savent-elles aujourd'hui ?). Il est vrai que l'intention était autre et se voulait positive, libératrice, il s'agissait d'un encouragement à l'inventivité de chacun afin d'exister pleinement en tant qu'individu. On peut considérer aussi ce radicalisme comme un moment nécessaire pour effectuer une mue. Néanmoins, depuis cette époque l'auto proclamation artistique est devenu un fait banal.
En ce qui concerne plus spécifiquement l'enseignement des arts plastiques, la créativité a été, positivement, le moteur du changement. Elle a permis de libérer les arts plastiques de l'académisme en ouvrant à la diversité. C'en était fini au début des années 70 de la réponse unique à une question, à un sujet proposé, à la soumission à un modèle et d'ailleurs à tous les modèles. L'art lui-même était suspecté d'être « officiel » et « bourgeois ». C'est en fonction de ce rejet, en abandonnant l'académisme, survivance du système dépassé des beaux-arts, que la transformation de l'enseignement des arts plastiques s'est effectuée selon une conception culturelle étendue à la société elle-même comme référence. L'investigation du réel a été la nouvelle motivation en portant intérêt à l'environnement, aux signes sociaux, aux comportements, en utilisant l'image et en expérimentant toutes sortes de matériaux. De nouvelles formes didactiques et pédagogiques se sont développées prenant en compte l'élève individuel, favorisant sa démarche personnelle. Et surtout, l'expression de l'élève est devenue une question centrale, privilégiée, au détriment de la technicité et du savoir-faire d'autrefois. Cet enseignement s'est ainsi trouvé en accord avec les aspirations sociales d'un monde nouveau. Tout cela, c'est l'aspect qui est apparu immédiatement positif.
Cette période fertile de déconstruction-construction, je l'ai particulièrement vécue avec engagement ce qui a donné lieu pour ma part à des innovations pédagogiques avec notamment l'enseignement en proposition.
Information(s) pédagogique(s)
Fichier joint
fichier pdfRessources associées
-
le titre du document : il doit susciter le l'intérêt
- Collèges tous niveaux
- Lycée tous niveaux
- article
- enseignant
- inspecteur
- étudiant
- non précisé