création d'un atelier artistique au lycée Malraux (Allonnes, Sarthe)

Le lycée où j'enseigne depuis plus de 10 ans maintenant est un lycée  d'enseignement général, un LEGT...
Où les élèves sont « normaux », c'est-à-dire qu'ils sont attentifs aux propositions qui leur sont faites en matière d'expression de soi, que cette expression soit culturelle ou artistique...
Hélas, situé en périphérie de l'agglomération mancelle, c'est une bagarre incessante pour obtenir des moyens institutionnels pour la pratique de l'art. La série L de l'établissement est particulièrement pénalisée !
Il n'y a encore pas si longtemps il n'y avait aucune option artistique, même facultative. Alors à force de persévérance et de raccomodage (en prenant sur telle ou telle décharge), il a d'abord été mis en place une option facultative « Arts Plastiques »... De la même manière la participation au Goncourt des lycéens a permis d'obtenir la spécialité « Maths » en L... Mais cela n'est pas suffisant : pour que la série soit stable en effectif, il faut une option Arts et Lettres, une option lourde.

Hélas, je ne sais pas dessiner, suis bien piètre en théâtre, je ne sais pas filmer... Que faire ? Je lis beaucoup de poésie, j'en écris... un peu. Souvent je fais écrire les élèves, en classe... Je sais aussi qu'un bon nombre d'entre eux écrit des vers ; certes pour eux-mêmes mais alors ?

• Monsieur le Proviseur, il faut une option Arts et Lettres pour cet établissement.
• Tout à fait d'accord. Mais comment faire ?
• J'ai bien pensé à quelque chose.
• A quoi ?
• Un atelier d'écriture, un atelier de pratique...
• Pourquoi pas ! Mais vous auriez besoin de quoi ? Vous savez que nos moyens sont limités.
• Je le sais, mais ce n'est pas de "quoi" dont j'ai besoin, mais de "quelqu'un".
• Quelqu'un ?
• J'ai besoin d'être aidé et de partager ; j'ai aussi besoin que les élèves puissent avoir un interlocuteur « officiel » qui ne soit pas un prof, qui soit leur lecteur ou leur lectrice...
• Je vois...
  

Et c'est comme cela qu'a été recrutée une assistante d'éducation (mais aussi pour ses propres compétences !), qu'a été déposé un dossier pour demander l'ouverture d'un atelier de pratique, orienté vers l'écriture. Comme la réponse a été favorable, l'atelier a démarré en septembre 2007.
A cette époque l'atelier n'avait de nom, on le nommait « Atelier » ou « Club », on lisait même parfois que c'était pour y faire de la lecture...
A ce sujet, la direction de l'établissement a permis qu'on lise en effet : plus de cent ouvrages de poésie contemporaine ont été achetés.
C'est qu'on avait été bien conseillé...

• Monsieur Boudet ?
• Lui-même !
• Voilà je souhaiterais ouvrir un atelier de pratique, tourné vers l'écriture... J'ai besoin de vos conseils...

Arrivé chez lui, nous n'avions plus grand chose à nous dire très vite. Enfin... en 10 minutes, nous avons découvert que nous lisions Giono, Rigoni Stern, Kerouac... que... que... nous n'avions plus qu'à parler de l'atelier.
Plus tard, pendant l'été, nous y sommes retournés avec Sohaila, l'assistante d'éducation, pour préparer les premières séances et repérer les éventuels lieux du séjour d'écriture.

Si vous lisez les poèmes de Jean-Claude Touzeil, vous y découvrirez très vite une certaine distance chaleureuse, la volonté très forte d'être toujours au bord de l'humain sans pathétique. Vous savez bien la propension des adolescents à superposer ou à confondre Poésie et Pathos.
Grâce à Jean-Claude, Sohaila et moi avons pu prendre une autre voie...
C'est ainsi qu'en décembre, après diverses hésitations (Des chemins de maux et de mots aurait pu être le nom de l'atelier...) les élèves proposèrent Des Chemins de mots.
L'atelier avait un nom et depuis il suit sa voie...

Ah ! J'allais oublier : depuis cette année le lycée demande officiellement la création d'une option lourde Arts et Lettres (ce sera certainement le théâtre...) et ouvre à la rentrée 2008 une option facultative théâtre...