l'après-spectacle: de l'émotion à l'analyse

Quelques principes avant de commencer :

On a tendance à privilégier souvent la préparation à la sortie au théâtre, l' « avant-spectacle », pour se rassurer, pour que la rencontre entre nos élèves et le théâtre soit réussie. Mais donner à nos élèves la possibilité d'exprimer leurs ressentis, de construire une critique argumentée, des références et des outils d'analyse du spectacle et de cet art qu'est le théâtre, est aussi essentiel pour qu'ils puissent devenir des spectateurs avertis. Et il est sûr qu'ils pourront faire preuve de cette expertise face à d'autres types de spectacle vivant et même d'autres arts (cinéma par exemple).
Il s'agit d'affirmer aussi que cette expérience de spectateur sur des textes ou des mises en scène contemporains doit permettre aux élèves de mieux lire et comprendre en classe les textes classiques. Marie Bernanoce, maître de conférences en études théâtrales et en littérature à l'université Stendhal-Grenoble 3, dans le dernier numéro de Continuum, revue de l'ANRAT, de juillet 2013, le précise en ces termes : « Il ne suffit pas d'emmener ses élèves au théâtre pour qu'ils sachent lire et désirent lire du théâtre. Il ne suffit pas de pratiquer des jeux dramatiques pour savoir analyser un spectacle. » Elle réaffirme plus loin l'importance de la lecture dramaturgique des textes: «le  recours au théâtre contemporain pour mieux comprendre et analyser les textes classiques en référence à des notions essentielles comme le 4ème mur, l'émergence de la notion de mise en scène, les relations entre écriture théâtrale et écriture romanesque, l'évolution du rôle et de la place des didascalies »...
Les temps de retour et d'analyse des spectacles vus avec les classes doivent être l'occasion de faire des élargissements sur l'histoire des lieux, des genres, des formes, de donner des connaissances théoriques et pratiques de l'histoire du théâtre (texte et plateau) ; ils doivent permettre aussi d'aborder le concret du travail théâtral (le jeu d'acteur mais aussi celui des sons, des lumières, des matières et des formes) et de mesurer l'apport de tous ceux qui participent à une création, bref de découvrir les réalités du plateau.
Rappelons aussi que l'objet d'étude « texte et représentation » introduit dans les programmes du lycée et du collège nous incite à accorder à ce temps de l'après-spectacle une vraie place au cœur de nos enseignements.
L'important, enfin, est de permettre à tous nos élèves d'oser parler, émettre leur avis sans retenue ni complexe, de construire une lecture critique et cela, le plus souvent de manière collective, dans le cadre de la classe et avec des pratiques d'oralisation, d'écriture ou de jeu.

Consulter les instructions officielles.
Pour le lycée. La réalisation scénique déterminant profondément l'écriture des textes dramatiques et permettant d'en faire jouer pleinement les effets, on s'attache à faire percevoir aux élèves les interactions entre texte et représentation. Prenant appui sur une programmation locale ou sur des captations, l'étude proprement littéraire du texte théâtral sera étayée par l'analyse de mises en scène comparées, et prendra ainsi en compte les données propres de la dramaturgie.
Pour le collège. Le professeur peut faire découvrir aux élèves le théâtre contemporain dans sa diversité et aborder la relation entre texte et représentation, en tenant compte de la collaboration entre les auteurs dramatiques et les metteurs en scène

Consulter également le portail interministériel de l'éducation artistique et culturelle.

On peut organiser (sans hiérarchiser car elles ont toutes leur importance!) le temps de l'après-spectacle en trois étapes différentes :
-le temps de la remémoration et des premiers échanges. Il s'agit de retrouver les images, les mots et si possible de passer pour cela par le corps et la voix, le jeu sur le plateau.
-le temps de l'expression individuelle et collective (écrits, jeu dramatique, improvisation théâtrale, petite forme collective). C'est le moment où l'on peut faire entendre le rapport subjectif de chacun à l'œuvre, une expression du sensible où n'existe pas de bonne ou de mauvaise réponse.
-le temps de l'analyse et l'on privilégiera ici l'analyse chorale dont les principes ont été énoncés par Yannick Mancel.

Tous ces temps et toutes les activités présentées ci-dessous sont possibles. Pour certaines classes on choisira des activités orales, plus spontanées, voire informelles, pour d'autres on développera les écrits ou les petites formes théâtrales plus construites ; face à l'expérience nouvelle qu'est, pour certains élèves, la représentation théâtrale, il faut concevoir une progression des activités au fil des spectacles et des années et varier les propositions de retour. Il est toujours important néanmoins de laisser s'exprimer les opinions quand les élèves, parfois déroutés, ont tendance à se tourner vers leur enseignant, pour savoir ce qu'il faut en penser !
Petit à petit on construira ainsi les compétences d'analyse du spectacle théâtral, une lecture plus structurée et raisonnée du spectacle vivant.

Rappelons enfin qu'à chaque moment de ce parcours on privilégie les exercices de jeu, d'oralisation et d'improvisation puisque le spectacle vivant, art de l'éphémère, est aussi celui où le langage du corps (rapport à l'espace, à la voix, à son corps et à celui des autres...), de la sensation et de l'émotion doivent prendre toute leur place.