Il nous est proposé ici de trier les moutons

Lecture des feuillets : enseignement d'exploration

Ce qui me dérange profondément à la lecture de ces programmes, c'est qu'en premier lieu, ils se situent non pas dans la perspective d'un développement le plus cohérent possible du potentiel d'intelligence, de réflexion de l'élève mais d'un point de vue utilitaire et économique dans lequel l'enseignement d'exploration s'inscrit d'entrée.

Dès le premier paragraphe il est question d' « enjeux économiques », dans le second, d' « opérateurs professionnalisés », dans le troisième de « véritable industrie », dans le quatrième de « consommateur », dans le cinquième de « projet de formation », dans le sixième de « choix d'orientation », et ainsi de suite comme si cet enseignement d'exploration n'avait d'autre but que d'être une sorte de vie de classe affinée, améliorée et systématiquement organisée chaque semaine pour bien mettre dans le crâne des élèves qu'ils allaient devoir s'orienter dans une société où seul le formatage sera nécessaire et où la réflexion n'aura plus lieu d'être. Comme s'ils ne le savaient pas, comme s'ils n'avaient pas vu leurs parents au chômage, comme si la crise n'existait pas et qu'ils n'auraient rien vu, comme s'ils ne s'étaient pas rendu compte que les cinq années de fac et les diplômes de leur sœur ou de leur cousine ne lui avait pas permis de trouver autre chose qu'un travail de caissière à mi-temps au supermarché du coin.

Lecture du programme consacré aux arts visuels

Je ne pense pas que ce soit en faisant un survol des métiers liés aux productions artistiques ou de communication que l'élève se rendra compte des contraintes matérielles mais au contraire en ayant le temps de mettre en place et de développer des projets plastiques qui nécessitent donc du temps pour s'élaborer et se réaliser, qui nécessitent des adaptations sans renoncer pour autant au but recherché. C'est en forgeant que l'on devient forgeron, pas en allant lui serrer la louche.
Deux hypothèses :
Ou ces quatre pages sont là pour faire joli.
Ou elle nous engagent dans un réel travail avec les élèves et alors ce n'est pas en 1h30 que tout cela peut se mettre en place.
A moins que ce ne soient les professeurs d'arts plastiques qui posent problème en voulant faire manipuler les élèves ; dans ce cas, il ne sera plus nécessaire d'avoir recours à leurs services puisque tout le monde va pouvoir s'y mettre, c'est à dire personne et puis pour faire de l'animation est-ce bien nécessaire d'avoir un enseignant formé, le B.A.F.A. ne suffirait-il pas?

Les enseignements artistiques nécessitent une pratique qui ne peut se développer qu'avec le temps, ce sont aussi des disciplines qui permettent aux jeunes de se former, de se questionner, de mûrir et d'orienter leurs parcours de formations en ne se dirigeant pas forcément vers les domaines artistiques mais dont les expériences menées auront contribué à en faire des citoyens responsables et informés. Ce sont bien des citoyens que l'école a pour mission de former, pas des moutons et ici il nous est proposé de trier les moutons.