les pratiques numériques des adolescents

Pour Laurence Allard, il existe de véritables usages créatifs de la part des jeunes via les smartphones et souvent les adultes ou les experts n'ont pas véritablement conscience de cette créativité. Ils la méconnaissent et se limitent souvent aux dangers du net. Ces propos souvent moralisateurs sont d'ailleurs tournés en dérision par les jeunes eux-mêmes.

une esthétique du remix et du détournement

Le numérique permet aux adolescents une « individuation expressive ». À travers certaines applications ou le selfie les jeunes dramatisent leur vie, la mettent en scène, jouent avec le temps. Le smartphone devient alors un médium d'expression personnelle (voir le succès des vidéos taguées everything on my phone sur youtube).

Les créations des adolescents appartiennent à l'esthétique du remix, il s'agit de copier-coller des contenus préexistants. On peut citer le succès de Tumblr (plateforme de micro-blogging dont le principe est de rebloguer des images ou des vidéos) ;  ou encore de ce que l'on nomme "les buzz".

Les usages déployés sont aussi d'un ordre "défensif parodique". De nombreux internautes utilisent la stratégie du détournement pour faire passer un message de prévention à l'intention des autres jeunes. Laurence Allard fait notamment référence aux capsules vidéos intitulées Non mais t'as vu ce que t'écoutes ? qui analysent et critiquent de façon parodique certains clips musicaux, format très prisé des jeunes.

des communautés créatives

Les jeunes se regroupent également par communautés (ce que Laurence Allard nomme les fandoms, une sorte de vie collective idéale) aux enjeux identitaires très forts. On peut prendre pour exemple, la communauté des fans de mangas. Il existe ainsi de véritables « teams » qui ont pour but de sous-titrer ou de traduire les mangas qui viennent de sortir. Les équipes sont notées selon les qualités des traductions. Certaines équipes font aussi œuvre de création puisque sur certaines vidéos il y a une réflexion sur la spatialisation des sous-titrages.

Pour conclure, Laurence Allard, a insisté sur le fait qu'internet ne doit pas se réduire à facebook, à twitter. L'école ne doit pas courir après les usages des réseaux sociaux mais doit en inventer de nouveaux. Le fabriquer soi-même, l'internet des objets peut être une alternative, une voie à ouvrir, à explorer. L'éducation nationale se doit de porter des projets citoyens et environnementaux : il faut réorienter le net vers ces deux axes, faire en sorte que l'internet des objets ne soit pas vu comme un moyen de surveiller tout citoyen mais comme un moyen d'améliorer la vie en société, le milieu environnemental. L'exemple des femmes vivant dans les pays pauvres qui peuvent avoir accès à la culture via le smartphone et l'exemple des internautes qui opèrent une surveillance de l'air en collaboration avec Airparif ouvrent des perspectives intéressantes.

Pour en savoir plus sur Laurence Allard :
http://www.culturesexpressives.fr
Téléphone mobile et création, Armand Colin/recherches, 2014